La légende de Siegfried

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Caractéristiques de l’édition

L’impression du texte a été réalisée sur Velin d’Arches pur chiffon spécialement fabriqué pour cette édition.
La reliure en pleine peau traitée à l’ancienne est enrichie d’un émaux ; elle est protégée par un étui galbé bordé cuir. Les décors et les ornements qui l’embellissent sont une création exclusive.

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Description

En juin 1755, un médecin de Landau, Jacob Hermann Obereit, découvrit dans les archives de la bibliothèque du Château de Hohenems un vieux codex, format in-quarto, d’épaisseur moyenne, en parchemin relié, contenant des poèmes en vieux souabe, langue archaïque faisant surgir un monde séparé de nous par plus d’un demi-millénaire. Ainsi nous est parvenu, dans une version du XIIIe siècle la Chanson des Nibelungen, légende déclamée dans les cours des princes et des rois, exaltant le merveilleux, l’extraordinaire, les combats avec les puissances du mystère.

La légende de Siegfried et des Nibelungen est la seule grande épopée nationale qu’aient produite les peuples de l’Europe depuis l’antiquité. Elle renferme les traditions héroïques des Francs, des Burgondes et des Goths. On y trouve le souvenir des anciens mythes que la race conquérante a apportés avec elle en quittant les plateaux de l’Asie.

L’action se passe au temps d’Etzel, nom sous lequel est désigne Attila dans les Chroniques allemandes, lors de ses derniers Combats avec les Burgondes, peuples issus de Bur, héros du Nord, lesquels après être sortis de leurs forêts profondes où ils adoraient Vodan ou Odin, descendirent en Germanie et s’étendirent dans les contrées rhénanes. Quatre cours y sont successivement le théâtre des évènements : la cour de Siegmund, le roi des Francs à Xanten (Bas-Rhin allemand), la cour du roi des Burgondes, Gunther, à Worms, celle de la reine Brunhild à lsenstein en Islande et celle d’Etzel (Attila) à Ofen (Buda) en Hongrie.

Les amours de deux couples héroïques, de Siegfried, l’invulnérable jeune roi des Nibelungen, peuple du Nord qui habitait la contrée nuageuse de Nebel-Land, terre des brouillards et de la belle et chaste Kriemhíld, fille du roi des Burgondes, ceux de Gunther et de la puissante et redoutée Brunhíld : telle est la matière du poème.
Nous assistons à des batailles où l’honneur, le dévouement, la religion sont les mobiles exclusifs. Les femmes se mêlent aux héros. Les scènes pacifiques, les mariages, les plantureux festins, les fêtes poétiques et chevaleresques, alternent avec les combats.

Toutes les passions humaines, l’ambition, l’amour, l’amitié, la vengeance, trouvent dans les divers personnages une expression dramatique. La courtoisie y joue un grand rôle. Ce mot ne désigne pas seulement les élégantes de la vie dans les Cours, mais l’idéal le plus élevé de la chevalerie, la bravoure à toute épreuve et la loyauté.

La légende de Siegfried a une origine historique. C’est chez les Francs qu’elle s’est forgée, lorsque le roi d’Austrasie Sigisbert, époux de Brunehaut, fut assassiné en 575 sur l’instigation de Frédégonde. Le mythe de Siegfried, héros aux yeux étincelants, à l’âme pure, tueur de dragons et libérateur de princesses endormies, mourant à la fleur de l’âge sous les coups d’ennemis sombres et perfides, remonte jusqu’aux plus lointaines origines de notre race, dans la nuit du passé immémorial. Il est l’image altérée d’un dieu germanique.

De même que l’Illiade, la légende de Siegfriede célèbre la grande lutte de l’Europe contre l’Asie en exaltant le sentiment national pénétré des idées religieuses de son temps. Les familles puissantes y trouvent leur mention et y cherchent leur généalogie comme les princes et les peuples de la Grèce dans les vers d’Homère.

Le nom de l’auteur reste encore inconnu. Pendant longtemps, cette chanson de gestes fut attribuée à Conrad de Wartbourg, poête minnesaenger de la fin du XIIIe siècle. De nouvelles recherches ont fait penser que le sage Klings Ohr, docte juge des combats de la Wartbourg, ou Henri d’Ofterdingen pouvaient en revendiquer la gloire.

En fait, les poètes, quels qu’ils soient, élevés à l’école de nos trouvères dont le grand modèlee était Chrestien de Troyes, ont travaillé sur les anciennes Sagas des scandinaves dans lesquelles on retrouve les noms des principaux héros. Les traditions et les légendes qui constituent l’histoire des Nibelungen ont été, comme celles qui constituent les Livres sacrés, l’objet de commentaires étendus et d’études approfondies. Goethe a dit qu’il n’était permis à personne de les ignorer.

RICHARD WAGNER, inspiré par ces vieilles légendes de la mythologie germanique, composa entre 1851 et 1874 sa Tétralogie, nom sous lequel on ddésignele plus souvent l’Anneau du Nibelung, cycle dramatique comprenant L’Or du Rhin, la Valkyrie, le jeune Siegfried, la Mort de Siegfried ou le Crépuscule des dieux. On y voit la puissance maléfique de l’or provoquer la chute et la destruction du monde des dieux et des héros, tandis qu’un univers nouveau, coloré par le reflet des idées chrétiennes, apporte le salut par l’amour et le renoncement, provoquant ainsi un cataclysme cosmique.

Maurice Betz, traducteur exemplaire

Dans les diverses pérégrinations occasionnées par les croisades, le génie allemand avait fraternisé avec celui des troubadours provençaux ou des trouvères du nord de la France et goûté le charme du fantastique et merveilleux Orient. Le Xllle siècle fut l’âge d’or de la poésie romantico-chevaleresque. Cette ère nouvelle s’explique par la préférence accordée au doux et gracieux dialecte souabe, abondant de voyelles sonores et riche de mots et de tours poétiques sur le rude langage franc.

Aussi le choix de la traduction nous a paru délicat. Après avoir consulté à la Bibliothèque Nationale celle de Madame Moreau de la Meltière de 1839, d’Emile de Laveleye, éditée peu après, celle de Joseph Firmery du début du siècle, nous avons retenu le travail exceptionnel de Maurice BETZ.

Ce poète et traducteur français est né à Colmar en 1808. En avril 1917, il passe en France et s’engage. Après la guerre, il débute dans les lettres et publie des 1920 un recueil de vers Scaferlati pour troupes, puis il évoque dans un essai sur l’Alsace, Rouge et Blanc, la situation douloureuse de cette province. Sa double culture, son égale maîtrise des deux langues lui permettent de présenter au public français les chefs d’oeuvre de la littérature allemande contemporaine et en particulier les oeuvres de Thomas Mann ei de Rainer Maria Rilke. Il collabora aussi à de nombreuses revues.

Grâce à la qualité de son travail et de son érudition, sous sa plume le poème des Nibelungen gagne en vérité, en intérêt et en valeur esthétique. Il lui assigne un rang élevé dans l’histoire de la littérature européenne. Il est mort subitement à Tours le 31 octobre 1946.